L’âme israélienne du dialogue interreligieux : pourquoi la foi à un rôle central dans l’ancrage régional d’Israël
- The Ohr Torah Interfaith Center
- 20 juin
- 4 min de lecture
par Rav Dr. Yakov Nagen
"Alors je donnerai aux peuples des lèvres pures, afin qu'ils invoquent tous le nom de l'Eternel, Pour le servir d'un commun accord."- Sophonie 3:9
Au milieu du tumulte géopolitique, des stratégies militaires et des alliances mouvantes, la dimension spirituelle du rôle régional d’Israël est souvent négligée. Pourtant, j’estime qu’elle est la plus profonde et la plus pérenne. En tant que rabbin, enseignant et directeur du Ohr Torah Interfaith Center et du Blickle Institute, j’ai pu constater de mes propres yeux que lorsque la foi entre dans la conversation, non pas comme un problème à gérer, mais comme un fondement à embrasser, une porte s’ouvre. Non seulement vers la paix, mais aussi vers le sens.
La Bible hébraïque nous enseigne qu’Israël n’est pas simplement une terre, mais une vision : « une lumière pour les nations » (Isaïe 49:6). Ce n’est pas un simple slogan. C’est un appel au leadership spirituel, ancré dans l’humilité, la justice et la clarté morale. Dans une région où la religion est trop souvent instrumentalisée pour diviser, Israël doit contribuer à montrer comment elle peut aussi guérir. Tel est le cœur du dialogue interreligieux : aller au-delà de la tolérance et nourrir un véritable engagement entre identités. C’est précisément grâce à son caractère juif, et non malgré lui, qu’Israël peut dialoguer de manière significative avec ses voisins musulmans, chrétiens et druzes.
L’identité comme pont, non comme barrière
Les cyniques affirment que les conflits sont uniquement motivés par des intérêts matériels. Mais je crois que la vérité la plus profonde réside dans l’identité. Lorsque celle-ci est menacée, réduite ou niée, les tensions s’enflamment. La paix véritable ne viendra pas en niant qui nous sommes, mais en montrant que l’identité peut relier au lieu d’opposer. C'est de là que peut venir le véritable progrès.
Au Ohr Torah Interfaith Center (OTIC), nous appelons cela « la connexion avant la correction ». Que ce soit dans nos partenariats, du Maroc aux Émirats arabes unis, lors de shabbats interreligieux, de prières communes ou de webinaires et conférences autour de la foi, nous ne commençons jamais par débattre de théologie. Nous commençons par voir l’autre comme un reflet de l’image divine. Dans ces rencontres, je repense souvent à l’un de mes versets préférés du prophète Malachie :
“N'avons-nous pas tous un seul père? N'est-ce pas un seul Dieu qui nous a créés?” (Malachie 2:10)
Un exemple marquant s’est manifesté lors de la récente fête druze de Nabi Shu’ayb. Les Druzes y honorent le prophète Jéthro, connu dans le judaïsme sous le nom de Yitro. Révéré comme beau-père de Moïse et conseiller moral (Exode 18), il incarne un patrimoine et une sagesse partagés. C’est là que débute notre dialogue : non par un universalisme vague, mais à partir d’histoires sacrées et concrètes qui lient nos destins.
Assez de slogans
De nombreux efforts interreligieux échouent sous le poids des slogans : paix, coexistence, tolérance. Ce sont des idéaux louables, mais sans relation authentique, ils sonnent creux. Notre travail à OTIC cherche à enraciner le dialogue dans les valeurs de la Torah : Chesed (bienveillance), Emet (vérité), et Achva (fraternité).
Et les résultats sont tangibles. Des rencontres Bridges of Light à Jérusalem aux séminaires religieux conjoints à Parme, en Italie, en passant par les iftars du Ramadan avec des cheikhs et intellectuels musulmans, nous bâtissons un nouveau langage. Non pas un langage diplomatique, mais prophétique, dans lequel chaque partie est invitée à offrir le meilleur d’elle-même, au service de quelque chose de plus grand. Il ne s’agit pas d’effacer les différences, mais de les célébrer.
Comme je l’ai dit à Parme "Ce qui rend un bouquet magnifique, ce n’est pas l’uniformité des fleurs, mais leur diversité, reflet de la lumière radieuse du Dieu unique. »
Le rôle spirituel d'Israël
Pour qu’Israël accomplisse pleinement sa vocation, il ne suffit pas qu’il parle le langage de l’innovation ou de la défense. Il doit aussi parler le langage de la foi. Nos voisins ne recherchent pas seulement une alliance de circonstance. Ils aspirent à un partenariat porteur de sens. Et nous avons beaucoup à offrir : une tradition qui a survécu à l’exil, à la persécution, à la renaissance ; un peuple revenu sur sa terre avec une mission spirituelle intacte.
Réussir cette mission implique de reconnaître que nos voisins sont aussi habités par une quête de sens. Cela inclut même ceux qui s’opposent à nous. En tendant la main, non seulement à ceux qui partagent nos opinions, mais à tous ceux qui aspirent à la sainteté, nous commençons à réaliser la promesse d’Isaïe: "Une nation ne tirera plus l'épée contre une autre, Et l'on n'apprendra plus la guerre" (Isaïe 2:4).
Que ceci soit notre héritage
Le dialogue interreligieux n’est pas une activité marginale. Il est en première ligne de la rédemption. Il est temps de le reconnaître à sa juste valeur, avec des mots, bien sûr, mais aussi avec des moyens, des partenariats et une disposition à être transformé par la rencontre.
Que cela soit notre héritage, et notre lumière.
Article rédigé par Rav Dr. Yakov Nagen
Directeur du Ohr Torah Interfaith Center et du Blickle Institute (site)
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